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J e  r a c o n t e  d e s  s a l a d e s

Leo Bear Creek écrit sa « belle histoire »

Leo Bear Creek écrit sa « belle histoire »

« Je veux des photos/Un max de clips de vidéos/Montrer à mes enfants comme j'étais beau/En ce temps là on était chaud/Hum Hum 2016 ». Leo Bear Creek écrit ces paroles pour le titre 2016 du premier album des Pirouettes (Carrément Carrément) sorti en septembre. Le chanteur aux 23 bougies parle avec mélancolie du présent qu'il ne veut pas laisser s’échapper. Parce qu'il est amoureux, parce que Paris, parce que le succès lui sourit.

Leo préfère une table en terrasse. Peut-être craint-il les fauves découvrant leurs crocs sur les clichés qui ornent les murs jaunis du café. « Je suis un peu dans le mal », confesse le grand mince à la bouille d'enfant sage. L'ambiance confinée, les banquettes chaudes matelassées, le regard appuyé d'un couple de quinquagénaires défraichis qui n'ont plus rien à se dire et la musique aux fréquences trop aigües crachée à tous les coins de la salle : mauvais combo. Il est 17h30. Après une nuit « de pur bonheur » entre amis et petites pilules multicolores, l'humidité et la fraîcheur du mois de novembre sont bienvenues. 

Il revient tout juste d'une tournée en Europe. « Un Perrier citron s'il vous plaît ». Coming Soon, groupe dans lequel il joue de la batterie, était le « backing band » d'Adam Green pour la deuxième fois. Ils accompagnaient sur scène l'ancien chanteur des Moldy Peaches aux mélodies folk. Toujours pas redescendu de son nuage, Leo hallucine : « C'est notre idole donc c'était assez taré qu'il nous propose de faire deux tournées comme ça ». 

Après l'Autriche, l'Italie, l'Espagne, l'Allemagne, le jeune annécien retrouve Paris sa ville d'adoption, son appartement, ses potes dans le 11e, « quartier chill ». Il y retrouve aussi Victoria alias Vicky, sa chérie étudiante aux Arts Déco, binôme des Pirouettes. Il l'a courtisée en classe de terminale au lycée Louis Berthollet à Annecy. Elle le décrit à l'époque comme « une petite personnalité ». Leo raconte en sirotant ses fines bulles : « La première fois que j'ai écrit à Vicky sur Internet c'était pour lui envoyer le clip de France Gall et Michel Berger, Viens je t’emmène» Leo embarque sa princesse et la fait chanter à ses côtés. 

"Au pire, ça durera quelques années"

D'abord en tapant sur des caisses dans la chambre de son frère Ben, de 8 ans son aîné, puis sur une batterie au conservatoire, Leo apprend la musique et tombe dans la marmite. Au commencement il y a Coming Soon, son premier groupe, formé avec Ben et leur ami Guillaume. En parallèle, Antsy Pants naît de la collaboration avec Kimya Dawson, la chanteuse des Moldy Peaches. Et puis le déclic arrive. L’équipe d’un petit film américain indépendant contacte Antsy Pants pour leur BO. Le Leo aux cheveux longs et à la voix juvénile interprète Vampire, et Tree Huger. Juno connaît un succès retentissant : « un sacrée pactole ». Leonard Garnier devient Leo Bear Creek (nom qu'il a chipé au titre d'une chanson country de la Carter Family), The Pirouettes naît et Leo prend la décision sans « trop se poser de questions » d'en faire son métier : « Au pire, ça durera quelques années. » 

Les parents « hyper cool », avaient surtout envie qu'ils se fassent plaisir : « Ils nous ont encouragés dans nos projets. » Employé de banque et bibliothécaire, le père et la mère quittent souvent leur lac pour venir applaudir les fils musiciens. La soeur de 29 ans, Juliette, n'est pas musicienne mais enseignante en sociologie à l'université de Lille. Ils s'entendent bien « maintenant qu'[ils ne sont] plus des bébés ». Leo retourne à Annecy pour l'inspiration, les fêtes de famille, le ski, et enregistrer dans le studio d'un ami. À 23 ans, il touche « le SMIC » tous les mois. « C'est chaud », il faut « faire 507 heures au cours des derniers 10 mois et demi », en clair, « beaucoup de dates ». Il arrive presque à nous donner envie de tout plaquer : « Il ne faut pas penser au plan B, il faut y croire un max. » Décidé à mener de front ses deux projets musicaux, il « travaille beaucoup », confie Vicky. « J'aimerais plus composer », regrette-t-il, jamais rassasié.  

Les questions sur l'avenir le font sourire. « Bien sûr que je veux faire ça toute ma vie, je ne sais pas trop si je pourrais faire autre chose en fait. » D'ailleurs avec Vicky, « c'est au clair ». Si le couple se sépare, The Pirouettes continue. Pour le moment, « c'est une belle histoire, je crois qu'on kiffe. » Son expérience musicale avec la brune au teint laiteux sonne comme un rêve : « C'est génial, ça stimule le couple, les concerts c'est un peu comme des vacances. » Les yeux en forme de cœur, Leo s’épanche : « C'est bien pour un couple de faire des trucs comme ça », il fait une pause, « après, ça a ses darksides. Y'a des moments ou ça dérape, c'est normal. » Il sourit, placide. 

 

Leo parle vite d'une voix chantante, guillerette. « Pas encore » blasé par les concerts, il continue à jouer dans des petites salles avec Vicky, ému par leur « vraie chaleur ». Les gens l'arrêtent de plus en plus dans la rue. Il est « flatté ». Ils seront sur TMC dans l'émission Quotidien vendredi [25 novembre, NDLR] : « C'est super de le faire parce qu'il y a plein de gens qui regardent, ça serait cool que ça donne lieu à d'autres télés. » 

"Il peut être très impatient, comme un gosse"

Le bobo assumé, « beau gosse » auto-déclaré, végétarien depuis 5 ans, avoue son impatience, un défaut qui le rend parfois malheureux. Parce que Leo veut « tout tout de suite », il n'accepte pas les erreurs des autres. Victoria, après avoir souligner son « talent » et sa « détermination », reconnaît qu'il « met la pression aux gens, s'attend à ce que les gens soient très réactifs ». Sa partenaire en fait parfois les frais, elle qui a appris sur le tas la musique : « Il peut être très impatient, comme un gosse. » Autre défaut : il « ne sait pas cuisiner ». Leo rit, sa mâchoire carrée se décroche, on découvre une mouche au coin gauche de la lèvre supérieure. « Je déteste cuisiner, je passe un très mauvais moment quand je prépare à manger et quand je mange ce que j'ai préparé. » 

Dans les oreilles, le dernier titre DKR de Booba, l'album de Solange Knowles, l'intégrale de Daniel Balavoine. Dans les mains, peu de bouquins : « J'ai du mal à faire l'effort de prendre un livre. » Il a adoré le dernier Xavier Dolan, ses « gros plans », sa BO improbable (« Camille », « Exotica »), il a bavé devant Lily Rose Depp et Natalie Portman dans Planétarium, le dernier film de Rebecca Zlotowski. 

Malicieux, il retourne les questions spontanément. S'amuse moins quand on lui parle de politique. La primaire des Républicains ? Il en a pris connaissance le jour-même. L'élection présidentielle ? Il n'ira pas voter, ou « peut-être pour les Verts ». « Ca me déprime de penser à la politique [...] j'ai l'impression que personne ne pourra rien faire face au monde.» « Je suis en dehors de la société et ça me va. » 

« J'ai peur de l'anonymat. » Après avoir été photographié à « LA » avec Vicky par Hedi Slimane (directeur de la création Saint Laurent de 2012 à 2016), participé au Montreux Jazz Festival avec Coming Soon, un festival  « parmi tant d'autres », dormi dans son hôtel de luxe, s'être jeté dans le public de la Maroquinerie avec Vicky, Leo Bear Creek « espère que ça va continuer ». Et comment. Le 11 mai, les Pirouettes font la Cigale. Après, il y aura Solidays, les Francofolies.

Très naturellement, il ouvre ses bras pour un câlin avant de repartir sous la pluie. 

 

Portrait réalisé en novembre 2016.

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